La chatte rebelle et sans parti
1 Juin 2009
Le hasard fait parfois bizarrement les choses … il se trouve que mon tout nouveau fournisseur de croquettes et autres pâtés pour chats (une super bonne adresse) a son dépôt dans une ville proche de celle où j’ai passé mon enfance…
J’avais un peu de temps … et puis j’ai perdu mon père il y a maintenant 6 mois … j’avais déjà bien roulé … un peu plus un peu moins … au lieu de repartir une fois la voiture chargée… j’ai voulu retourner sur ces lieux gardés dans mon cœur comme quelque chose d’un peu secret… dans cet endroit, j’ai ri, pleuré, appris à marcher, mes tables de multiplications … etc. … bref, besoin de faire un petit pèlerinage …
Stupéfiant, tout a changé et rien n’a changé !
Les maisons sont là, la végétation a poussé, les oiseaux chantent toujours … mais les âmes ont changé !
Je me suis garée à côté de mon ancien portail, j’ai regardé à travers la porte … oui, je la reconnais bien cette maison que mon père avait pratiquement faite de ses mains, le week-end, avec un copain de service militaire … décédé lui aussi !
Et puis, la maison d’à côté, ce couple âgé et sans enfant qui portait un nom d’oiseau, avec qui nous nous entendions si bien que nous n’avions pas séparé les fonds, et ainsi les enfants jouaient chez la voisine, tout comme leur chienne Cora, venait chez nous… et puis la maison d’en face, également un très gentil vieux couple, dont la dame nous donnait souvent un bonbon, ou une fleur de son jardin, dont on ne perçoit plus aujourd’hui la façade tant la végétation a poussé …
Et puis la maison de Gérard, et puis celle de José, mes deux potes d’enfance … et puis aussi celle de Didier, Gilles, des grands-parents de Dominique … la rue était témoin de nos balles aux prisonniers, que nous faisions dès qu’il faisait beau, au milieu de la route … ou de nos courses de vélo … sous les regards bienveillants de tous les adultes …
Et puis il y avait aussi ces rendez-vous de signaux avec nos torches électriques dès qu’il faisait nuit et que nos parents nous avaient sommés de rentrer…
Les petits commerces ont disparu, laissant chacun prendre sa voiture pour quelques kilomètres plus loin, sur une butte, faire ses courses dans ces grands bazars d’hypermarchés à la gomme, là où nous achetons bien sagement comme tout le monde, uniquement les produits qu’on veut bien nous proposer, aux prix sans discussion, bref, dans l’ennui qui naît de l’uniformité.
Fini la petite épicerie où on allait chercher la tranche de jambon, la baguette, les nounours ( à l’époque ils étaient tellement meilleurs … tendres et fondants dans la bouche) et les malabars.
Fini aussi la petite librairie où je dépensais mon argent de poche pour me régaler des aventures du club des 5, ou de la série verte …
Je ne parle pas de la ferme où toute petite on allait chercher le beurre, le lait, les œufs … une autre époque où le chauffage était à charbon, où les tinettes étaient dehors (mon père a vite modifié ça !) et où ma grand-mère qui me ramenait de l’école me faisait déguster des marrons chauds …
Et puis et puis… tous ces gens, ils sont pratiquement tous morts ! il reste leur maison, leur jardin … la biscuiterie s’est transformée en fabrication de céramiques, des nouveaux occupent les lieux, ont bricolé quelques aménagements… je ne les connais pas, je n’ai même pas envie de les connaître … c’est une autre époque, la vie a passé, elle a fait son œuvre, il n’y a aucune raison de perturber cet ordre, et de mélanger passé et présent … et moi, je suis là, dehors, au milieu de cette petite route et je ne peux plus m’arrêter de sangloter …
Je n’étais pas venue depuis 35 ans !